Malika Intimity...

Ceux que j'ai aimés... (Chapitre 19)

Nous ne disions rien. J’étais assez mal à l’aise à vrai dire. Je ne le connaissais pas, ni d’Eve, ni d’Adam il n’y avait même pas vingt-quatre heures, et voilà que j’étais dans sa voiture, que je ne savais pas que dire et que je ne savais pas non plus où on allait.

C’est lui qui a brisé le silence au bout de quelques minutes qui m’ont semblées être une éternité. Il avait une voix agréable.

- Tu vois, tu as l’air quand même stressée!
- Non, ça va ! Je ne sais simplement pas quoi dire.
- Tu voudrais aller où?
- Tu voudrais faire quoi?
- Bah, je ne sais pas. Boire un verre ? Manger un bout ? Tu as mangé?
- Un peu, pourquoi tu voudrais aller manger?
- On pourrait… Tu réponds toujours à une question par une question?
- Tu reprends toujours des grands classiques quand tu ne sais plus quoi dire?..."

Et il m’a regardé et souriait. J’aimais bien son sourire. J’aimais bien ses yeux aussi. C’est marrant, il était tout le contraire de C., mais je lui trouvais quelque chose de très particulier. Il avait l’air tellement… tellement grand ! C’est la première impression que j’ai eue. Pas "Grand" à cause de son mètre quatre-vingt trois. Non, grand de présence. Par ce sourire, justement. Et par ce regard. Il m’impressionnait. Pas de peur mais de présence encore.

Je ne sais pas pendant combien de longues minutes je suis restée à le fixer sans rien dire, mais ça à fini par le faire rire.

Il a à nouveau brisé le silence en me demandant où je voulais aller. Je lui ai dit que j’allais lui faire confiance parce que je n’avais absolument aucune idée d’où on pourrait aller. Il m’a proposé un petit restaurant qu’il connaissait bien, j’ai dit que je le suivais et nous nous sommes donc dirigés vers ce restaurant.

Arrivés devant l’établissement, nous avons eu la bonne surprise de la porte close. "Fermé du xx/08/08 au xx/08/08 pour vacances annuelles." Nous sommes donc finalement allés manger dans un autre établissement de la même rue. Ils acceptaient les chiens. C’était très bien. Sauf que mon chien, il avait décidé de ne pas accepter l’établissement.

Il était encore tout petit et durant tout le temps que nous sommes restés dans le restaurant, il pilait pour sortir, pleurait et aboyait. Le top pour un premier rendez-vous. Je vous laisse comprendre que je n’étais toujours pas du tout à l’aise.

Nous avons malgré tout beaucoup discuté. De pleins de choses, avec un feeling délicieux. J’ai fait une erreur ce soir-là, un petit mensonge. Mais je l’ai regretté. Au cours de notre conversation, nous avons parlé de nos précédentes relations, de la façon dont on les avait vécues. Des ruptures. Des déceptions.

Je lui ai parlé de J. et puis de C. Concernant C., je lui ai dit qu’on se connaissait, qu’il était un bon copain et qu’on avait partagé de la tendresse, dans le plus grand respect. Je n’osais pas lui dire qu’on avait couchés ensemble. J’avais honte.

C’est à ce moment là que je me suis rendue compte que j’avais honte du comportement que j’avais eu avec C., à ce moment là que j’ai vraiment réalisé ce qu’on avait fait. Ce que j’avais fait. Je m’étais donnée. Sans retenue, sans pudeur. J’ai eu honte d’un coup comme jamais je n’avais eu honte de ma vie. Tellement honte. Je me suis à nouveau sentie salie. J’avais offert mon corps sans rien attendre en retour. J’étais rentrée dans son jeu. Ses "sexe pour le sexe". J’avais accepté et j’avais tellement honte ! Et je me jurais que je l’aimais ! Ce n’est pas ça l’amour ! Je ne pouvais pas l’aimer !

J’ai chassé toutes ces pensées de ma tête et me suis recentrée sur la conversation. Il ne fallait pas qu’il sache que je m’étais donnée de la sorte. Je devais garder ça secret. De toute façon, je ne m’attendais plus à avoir de nouvelles de C.

Nous parlions tellement, de tellement de choses, avec tellement de facilité que je me souviens que lui comme moi mangions très doucement. Tellement doucement que nos assiettes étaient encore pleines aux trois-quarts alors que leurs contenus étaient déjà froids.

J’ai feints que je n’avais plus faim et ai éloigné mon assiette. Je buvais ses paroles. J’étais pendue à ses lèvres. J’avais la sensation de le connaître depuis toujours, la sensation que nous nous retrouvions, pas que nous nous rencontrions pour la première fois. Étrange sensation. Il me fascinait. Je le trouvais très charmant. J’aimais ses yeux. D’habitude, je regarde difficilement les personnes que je ne connais pas dans les yeux, je ne sais pas pourquoi d’ailleurs, c’est comme ça depuis toujours. Mais lui, je n’arrivais plus à regarder autre chose que ses yeux. Ils étaient d’un bleu envoûtant et tellement expressifs. Je me noyais dans son regard en buvant ses paroles. Et je me sentais belle.

Une bonne demi-heure était passée depuis la fin du repas et nous étions toujours dans notre conversation lorsque la gérante de l’établissement nous a proposé l’addition. Nous étions les derniers clients. Je ne l’avais même pas remarqué. Il était 23h15 à peu près. Déjà ! Il a pris l’addition. Je déteste ça. Le moment où le garçon paie. J’ai toujours envie de proposer de payer ma part par pudeur. Je n’aime pas me faire offrir sous prétexte que je suis une femme. Mais je l’ai laissé payer.

Une fois sortis sur le parking, je me suis allumé une cigarette et ai laissé mon chien vagabonder un peu sur le bas-côté. Il m’a regardé d’un air étonné.

- Tu fumes!?
- C’est écrit sur ma fiche Netlog, tu n’as pas tout lu?
– Je n’avais pas fait attention.
- La cigarette te pose un souci?
- À part le fait que je ne fume pas et que donc je vais te demander de ne pas fumer dans ma voiture si ça ne t’ennuies pas.
- Je ne me le serai pas permise. Je suis quelqu’un de respectueux, sais-tu."

Pour qui me prenait-il ? J’ai préféré ne pas relever et lui ai proposé d’aller boire un verre avant de rentrer. Chose que nous avons faite. Un verre. Une heure et demie. J’aimais ces conversations. C’était agréable.

En sortant du bar, vers 1h du matin, il pleuvait des cordes. Heureusement, je savais que le temps allait être maussade et j’avais prévu un parapluie. Je l’ai donc déplié.

Il était déjà presque cinq mètres devant moi, sous la pluie. Il m’a demandé s’il fallait faire un tour avec le chien pour qu’il puisse faire ses besoins. Il le fallait. Nous nous sommes mis à marcher côte à côte vers un petit terrain vague. Ce serait parfait pour le chien, je pourrai lui retirer sa laisse.

Il restait découvert alors que j’avais un parapluie assez large pour mettre deux personnes à l’abri. Je lui ai proposé de se rapprocher. Chose qu’il a faite. Nous ne disions plus rien. On marchait serré l’un près de l’autre sous ce parapluie au rythme du bruit de l’eau qui s’échoue sur le macadam dans le silence de la nuit. Sans rien dire. J’entendais sa respiration.

Nous nous sommes arrêtés pour attendre le chien. Sans bouger. Serré sous ce parapluie. Nous nous sommes regardés. En silence. Ce regard… CE regard.

Je ne croyais pas au coup de foudre. Avant lui. Parce que CE regard. Ce n’était rien d’autre qu’un éclair. Un lien. Je l’ai su, et je le sais toujours. Bien sûr, à l’heure actuelle, nos chemins se sont éloignés et ne se croiseront plus jamais, mais cette rencontre, CE regard, c’était le vrai coup de foudre. Celui-là même qu’on vous raconte dans les films. Celui-là même qu’on décrit dans les grands romans d’amour. Mais un coup de foudre n’est souvent qu’un passage. Bref, revenons-en AU regard.

Nous avons baissés les yeux, en même temps. Foudroyée. Il venait littéralement de me foudroyer. Mon cœur éclatait. Je ne connaissais pas ça. Ce truc en moi, cette explosion dans ses yeux et dans mon cœur, au même instant, une liaison. Un lien serré. Mais un lien fragile, ça, nous ne le savions pas encore.

Mon pouls venait sans doute de doubler son rythme en une fraction de seconde. J’aurai pu l’embrasser. Il aurait pu m’embrasser. On n’en a rien fait. On s’est simplement regardé en souriant. Il l’avait senti. Je l’ai vu dans ses yeux. BOUM-BOUM-BOUM… Mon cœur éclatait dans ma poitrine. J’ai tourné le regard vers le terrain vague.

Le chien revenait vers nous. Nous sommes redescendus sur terre. Comme le chante Calogero, je me suis sentie en apesanteur. Dans ses yeux et dans mon cœur, le temps d’une fraction de seconde, parce que ça n’avait pas duré plus d’une fraction de seconde, j’étais en apesanteur. J’ai rattaché sa laisse à son collier, et nous nous sommes dirigés dans le silence le plus total vers la voiture.

Nous avons fait le chemin retour en silence. Il avait mis la musique, James Blunt, et nous étions tous les deux plongés dans nos pensées. Avant que je ne descende de la voiture, nous nous sommes dit qu’on avait passé une très agréable soirée. C’était vrai. Nous nous sommes souhaité une bonne et douce nuit et nous nous sommes fait la bise. La bise qui aurait pu déraper mais il n’en a rien été. Je suis descendue le cœur léger et le bras tiré par le chien qui était pressé de rentrer.

Lorsque j’ai eu claqué la porte derrière moi, je me suis appuyée contre elle et me suis laissé glisser jusqu’au sol. J’étais encore là-bas. Près de ce terrain vague. Dans ses yeux. Dans mon cœur.

Je suis monté dans ma chambre et ai attendu derrière l’ordinateur qu’il se connecte en rentrant chez lui.

(à suivre...)

Bien à vous.

Malika