Malika Intimity...

L'angoisse... La mort...

Hier, avec E., et des amis dont la femme est enceinte, on parlait bébé, forcément. E. a dit qu’il n’en voulait pas d’autre. Moi j’en veux au moins un autre. Et cet air sérieux qu’il avait m’a glacé le sang. Les pensées qui ont alors envahi mon esprit m’ont fait honte. Et s’il arrivait quelque chose à notre fille ? Que deviendrons-nous ? ! Cette idée me suis au quotidien. Celle que la vie, d’une manière ou d’une autre, m’arrache ma fille !

Je veux, bien entendu, un autre enfant pour des tas d’autres raisons, mais pour celle-là aussi. Parce que si j’ai un deuxième enfant et qu’il arrive quoi que ce soit à l’un d’entre eux, je n’aurai d’autre choix que de rester forte pour l’autre. C’est glauque et monstrueux, même. Je le sais, mais cette pensée est "inconsciente". Plus forte que moi. Elle sort de l’ombre dès qu’elle le peut. Et je sais que jamais l’un ne remplacera l’autre, mais je crois que les parents qui perdent leur enfant unique ne surmontent pas leur souffrance de la même manière que des parents qui perdent un enfant et doivent continuer à exister pour leurs autres enfants.

En fait, c’est un traumatisme d’enfance, je pense. À 8 ou 9 ans, le fils de mes voisins âgé de 3 ans et demi est mort dans son sommeil. Je me souviens comme si c’était hier du cri perçant de sa mère, des hurlements d’injustice de son père. Je me souviens comme si c’était hier de leur parcours ensuite. Leurs propres vies leurs ont filées entre les doigts. Ils subissaient chaque jour le levé du soleil, ne souriaient plus, ne regardaient plus les gens. Ils déposaient chaque vendredi dans un rite monstrueux une rose blanche devant la photo du gamin. La seule chose qu’il leur restait. Une photo. Je n’oublierai jamais ce petit bonhomme, et à jamais, il nourrira ma peur et mon angoisse continue et quotidienne. Ses parents ont eus deux enfants après lui. Mais rien n’était plus pareil. Elle vivait ses grossesses dans un deuil tellement évident. Le jour de leurs naissances était lourd et douloureux. Tout rappelait le premier. Tout rappelait la
Douleur. Ils se sont séparés, tellement rongés par leur souffrance commune, alors que le deuxième - le troisième, en fait… - n’avait pas encore un an. Et d’avoir continué à fréquenter le père, je sais que la résonance de son prénom, l’écho des quelques notes de la musique de l’enterrement ou un regard sur cette photo jaunie et défraîchie suffisent à le faire flancher, à ce que toutes ses barrières et ses airs d’homme fort lui explosent au visage.

La mort de cet enfant a été la naissance de ma plus grosse angoisse…

Bien à Vous.

Malika